Quelles sont les idées reçues du manager quand on arrive en poste ? Quelles sont les croyances limitantes qui peuvent survenir au fur et à mesure de sa carrière ?
Pour répondre à ces questions, j’ai invité Julie Danet au micro de Feedback.
Ensemble, nous allons décortiquer le mindset du manager en analysant les pensées qui peuvent traverser ton esprit tout au long de son expérience managériale. Mais aussi te donner des astuces pour lever ces barrières et ces blocages.
Première idée reçue du manager : je suis manager donc je dois toujours être au top
Ne cache pas tes émotions
L’idée reçue du manager qui revient le plus souvent est de se dire qu’une manager ne doit rien laisser transparaître.
Tu te dis peut-être toi-même que tu dois cacher ce que tu as dans la tête.
Tu n’as pas le droit d’être un peu triste, tu n’as pas le droit d’être trop euphorique non plus. Un manager doit être neutre.
Pourtant, tu restes une humaine avant tout. Que tu sois manager ou pas, tu es un être humain qui vit des émotions.
Dans la société actuelle, on a tendance à vouloir lisser ce qu’on ressent.
Pourquoi ?
On peut avoir ce sentiment de honte, de ne pas assumer ce qui se passe dans la tête. Alors que tu ne peux pas passer à travers tes émotions car c’est quelque chose que tu vis.
Il est vraiment temps de surmonter cette idée reçue sur manager et d’assumer que nous sommes des êtres humains, que nous avons des émotions, des sentiments. Et il faut les vivre pleinement !
Tu es une personne à part entière
Dans le milieu professionnel, il est aussi temps de mettre un coup de pied dans ce fameux adage selon lequel les problèmes doivent rester à la porte de l’entreprise.
Ta vie pro et ta vie perso te composent. Tu n’as pas deux personnes en toi dont une dédiée au perso et l’autre dédiée au pro.
Tu es un ensemble, une personne à part entière.
Quand tu ne vas pas bien, il n’y a aucune raison de laisser tout ce qui ne te convient pas à la porte quand tu arrives au travail.
C’est la même chose quand tu es manager.
Quand tu es une bonnne manager, tu dois encourager tes équipes à dire lorsque ça va et lorsque ça ne va pas.
Pourquoi ?
Pour comprendre leur état d’esprit, pour pouvoir les accompagner au mieux.
Alors si tu encourages tes collaborateurs à le faire, pourquoi tu t’empêches toi-même de le faire ?
En termes de posture, montrer ses sentiments envoie ce message : tu assumes tout ce qui se passe pour toi et tu es capable de le transmettre.
Les émotions créent du lien
Toutefois, cela ne signifie pas que tu dois aller mal tous les matins.
Accepter ses émotions, c’est s’accepter soi. Et les transmettre fait partie des forces de l’être humain et du manager.
Transmettre ses émotions crée du lien avec tes collaborateurs. Ils vont se sentir plus en confiance. C’est de cette façon que tu vas encourager les personnes avec qui tu travailles à te partager comment elles se sentent.
Mon mot d’experte : on n’est pas des robots. On a la chance d’être des humains et de ressentir des émotions. Personne n’a envie d’être managé par un robot ! On a envie d’avoir une manager qui arrive à capter quand ça va et quand ça ne va pas. D’avoir une manager qui arrive à rire et à dire quand elle n’est pas contente. Les collaborateurs ne veulent pas d’un manager froid et insensible. Les émotions doivent être intégrées dans ta façon de manager. Il est donc important de les partager avec tes équipes.
☝️ Je te laisse découvrir mon article : pourquoi la vulnérabilité est une force au travail ?
Deuxième idée reçue du manager : je dois avoir réponse à tout
S’il existe bien une idée reçue du manager, c’est celle-ci : je ne dois pas dire que je ne sais pas, je dois avoir réponse à tout.
La peur d’être jugé
Au-delà du manager, cette croyance est humaine.
Quand on doit dire “je ne sais pas”, quelque chose de douloureux peut se déclencher en nous.
Pourquoi ?
Car on a peur du regard de l’autre, de se faire juger.
La vérité, si tu crois en cette idée reçue du manager, c’est que c’est ton ego qui parle.
On n’aime pas ne pas savoir. On a tendance à se juger soi-même.
C’est seulement toi-même qui n’assumes pas de ne pas savoir.
Alors que c’est totalement ok !
Il vaut mieux dire à un collaborateur que tu ne sais pas et que tu vas te renseigner. Plutôt que d’inventer une réponse.
Beaucoup veulent tellement avoir réponse à tout. Alors qu’au contraire, ils risquent de se décrédibiliser davantage.
Les avantages de ne pas savoir
Être manager ne signifie pas avoir réponse à tout.
Être manager n’est pas synonyme d’être une encyclopédie.
Tu n’as pas besoin de tout savoir pour être une bonne manager.
Au contraire, ne pas savoir permet d’impliquer les bonnes personnes dans ton équipe pour intervenir.
Comment ?
Tu peux valoriser et faire monter en compétence les personnes au sein de ton équipe. C’est donc un atout de ne pas tout savoir.
Ne pas savoir permet de prendre du recul et de faire monter en puissance d’autres collaborateurs, et donc de développer toi même ton leadership.
Si personne de ton équipe prend le relai, cela va te permettre d’aller chercher toi-même l’information et de revenir avec plus de bagages.
Mon mot d’experte : on est souvent propulsé manager dans une équipe composée d’experts ou dans une équipe plus âgée que soi. C’est donc l’occasion dans ce cas-là de s’entourer d’experts et de valoriser l’expertise des personnes qui sont autour de soi. Il n’y a rien de pire pour braquer ses collaborateurs que de les brider. Ne pas savoir est donc le meilleur moyen de reconnaître l’expertise des autres, d’engager son équipe et de se positionner en manager. Car le rôle d’un manager n’est pas de tout savoir mais d’être un coordinateur, un animateur qui va développer les compétences des autres.
C’est une force de savoir admettre que l’on ne sait pas tout et d’aller chercher l’information au bon endroit.
Il faut assumer de ne pas tout savoir. C’est quelque chose qui va t’emmener beaucoup plus loin que de tout savoir.
Troisième idée reçue du manager : je ne suis pas légitime pour manager
Beaucoup de managers se disent que s’ils ne connaissent pas le métier, ils ne sont pas légitimes pour manager.
Que pour être une bonne manager, il faut connaître tous les métiers.
Alors que c’est totalement faux.
Quel est le rôle d’un manager ?
Un manager, c’est un chef d’orchestre :
- Il aide à prendre de la hauteur,
- Il accompagne, il conseille,
- Il est dans la communication,
- Il donne des méthodes de travail,
- Il aide à adopter une meilleure posture.
Un manager a plusieurs casquettes.
Mais il en existe une qu’il n’a pas : savoir tout sur tous les métiers. Il n’est pas là pour ça, ce n’est pas son rôle.
Le rôle du manager est d’apporter une autre dimension que la partie technique et opérationnelle. C’est à partir de là que la communication et le travail d’équipe deviennent le centre.
L’objectif du manager est de puiser dans chaque force de chaque collaborateur pour faire en sorte que son équipe soit puissante et solide, pour qu’elle réussisse à atteindre les bons objectifs.
Peu importe les métiers, il doit les coordonner pour qu’ils arrivent ensemble à un même objectif.
☝️ Je t’en dis plus dans mon article Manager : doit-on être expert pour être légitime ?
Pourquoi ne se sent-on pas légitime ?
L’erreur la plus courante qu’on rencontre dans les entreprises est que beaucoup de managers sont promus managers parce que c’est la suite logique de leur évolution au sein de leur poste.
Alors que beaucoup n’ont pas envie, ni les bonnes compétences pour devenir manager.
Mais ils sont tout de même propulsés car c’est une manière de les récompenser du travail qu’ils font.
C’est de cette façon qu’est née une mauvaise idée reçue du manager : le manager est quelqu’un qui maîtrise bien le métier. Et si ce n’est pas le cas, cela signifie que ce n’est pas une bonne manager.
Il ne faut pas confondre le rôle de manager avec le rôle opérationnel.
Ce sont deux rôles totalement différents.
Les risques de vouloir tout contrôler
Grâce à ce recul, tu peux te décharger d’une charge mentale.
Pourquoi ?
Le manager a souvent l’impression qu’il doit tout faire. Et dans des cas comme ça, on arrive souvent à du micro management pour réussir à tout maîtriser.
Le meilleur réflexe à avoir est d’instaurer de la communication, de la confiance, du suivi. Car un manager reste présent pour suivre ce qui se passe.
Le but est de ne pas tout contrôler.
Mon mot d’experte : il peut être intéressant de recruter des managers qui ne connaissent pas du tout les métiers afin d’apporter une dimension purement managériale. Il existe déjà des experts dans les équipes. Et ils sont experts parce qu’ils font leurs tâches tous les jours depuis des années. Tu ne peux pas croire qu’en quelques semaines de formation, tu en sauras autant qu’eux. Tu risques de saper ta crédibilité et ta légitimité. Donc en voulant essayer d’apprendre toute l’expertise de ton équipe, tu te tires une balle dans le pied.
Ton rôle de manager est de sortir rapidement de l’opérationnel.
Ce n’est pas ton rôle de rester dedans.
Dans les petites entreprises, il peut y avoir des tâches opérationnelles. Mais elles ne doivent pas recouvrir le maximum de ton temps. Il faut que tu te détaches d’elles.
Quatrième croyance du manager : j’ai peur qu’on me pique ma place
Autre idée reçue du manager : j’ai peur qu’on me pique ma place si mon équipe devient meilleure que moi.
On retrouve ici la peur de se faire juger, la peur de se faire évincer, de ne pas être à la hauteur. Beaucoup d’insécurité peut surgir avec cette croyance.
Faire monter en puissance son équipe
Le rôle d’un manager est de chercher à élever au maximum son équipe.
Tant mieux si certains arrivent à te surpasser.
Pourquoi ?
Cela signifie que tu as fait un excellent travail. Tu es donc un très bon manager.
Tu peux avoir peur qu’on te prenne ta place. Mais rares sont les managers qui se font expulser parce qu’ils ont réussi à faire monter en puissance leur équipe.
C’est même un atout au sein d’une entreprise.
Si tu arrives à faire monter tes collaborateurs, tu vas monter avec eux.
Donne tout pour qu’ils te surpassent. C’est ça qui va montrer que tu es une bonne manager et que tu es au bon endroit. Tu vas pouvoir asseoir ta posture de manager et montrer que tu fais bien les choses.
Surmonte cette idée reçue du manager !
Cherche à ce que ton équipe fasse mieux que toi !
C’est le but ultime du manager.
C’est important de mettre de la valeur sur cette mission du manager.
Ton rôle est la clé dans l’évolution de ton équipe.
Mon mot d’experte : pour l’avoir vécu, on a un sentiment de satisfaction et de joie pour son équipe qui est juste incroyable. Si on arrive à avoir une équipe qui est meilleure que soi, c’est un gain de performance pour l’entreprise.
Être meilleur ou comment créer de la démotivation
Dans le cas des équipes commerciales, un manager positionné en compétiteur est souvent amené à signer les plus gros contrats et donc à produire un meilleur chiffre d’affaires que son équipe.
Pourtant, ce n’est pas son rôle de le faire mais celui de ses collaborateurs commerciaux.
Les scores du manager peuvent être jugés et renvoyer une image de compétences inatteignables.
Et c’est de cette façon qu’un manager peut créer de la démotivation au sein de son équipe. Il ne doit pas forcément être plus fort qu’elle. Ce n’est pas du tout le but.
Il faut donc transmettre ses compétences au maximum.
Et d’enlever la partie opérationnelle pour passer à une partie plus stratégique.
Ce n’est pas parce qu’un manager va perdre en résultat opérationnel qu’il va perdre sa place. L’objectif est justement de transmettre ses compétences opérationnelles.
Et le manager en retire une satisfaction du travail bien fait.
Ton rôle de manager est donc de transmettre. Mais aussi d’aller chercher le meilleur en chacun. C’est ici aussi que se trouvent la puissance et la beauté du métier.
Tu arrives à donner ce qui est nécessaire à chaque collaborateur pour qu’il puisse faire ressortir tout ce qui est important en lui et tout ce qui est impactant pour l’entreprise.
Le manager a aussi un rôle de jardinier. Il doit faire éclore son équipe.
Plus tu as de bons résultats, plus tu peux être fière de ton travail.
☝️ Je t’explique cet aspect dans mon article : entreprise libérée, comment l’adopter ?
Cinquième blocage du manager : je ne peux pas m’absenter
La dernière idée reçue du manager que l’on va surmonter ici : je ne peux pas m’absenter, mon équipe a trop besoin de moi.
Personne n’est indispensable
Ça peut faire mal à lire et à entendre. Mais c’est la réalité des choses.
Au contraire, tu dois chercher à te rendre dispensable.
Si tu arrives à pouvoir partir en vacances ou à être absente, c’est que tu as fait monter ton équipe en puissance, qu’elle est autonome, qu’elle sait gérer. Cela signifie que chacun connaît son rôle et ses responsabilités. Le travail est juste bien fait.
Chercher à se rendre dispensable, c’est prouver que tu as réussi à bien faire les choses.
Être indispensable peut flatter l’égo. Mais ta charge mentale risque aussi de grandir.
Cherche l’autonomie et la confiance que tu as dans ton équipe.
Les risques d’être indispensable
Mon mot d’experte : c’est un sujet un peu clivant que de dire qu’un bon manager est un manager absent. L’objectif d’un manager est de déléguer au maximum et de se libérer du temps.
Si tu as trop de charge mentale et d’opérationnel, tu es tout le temps débordée.
Pense avant tout à toi ! Tu ne peux pas être sur tous les fronts, ce n’est pas tenable sur le long terme.
Si tu dois apporter une réponse ou une solution à tout, tu n’as plus assez de place dans ton cerveau pour voir les vrais problèmes. Les petites urgences cachent les vrais problèmes.
Tu risques également de ne plus voir les compétences de ton équipe.
Alors qu’être dispensable, c’est pouvoir se libérer du temps pour des entretiens 1to1 avec ses collaborateurs et donc créer un lien de confiance avec eux.
C’est aussi se libérer du temps pour les tâches clés du manager : missions stratégiques, atteintes des résultats et des objectifs, mise en place d’action, recherches des ressources. Être prise dans ton quotidien risque de mettre toutes ces tâches de côté.
☝️ L’épuisement professionnel, ça n’arrive pas qu’aux autres. Et je te le prouve dans cet article.
Comment se rendre dispensable ?
Mon mot d’expert : les meilleurs managers sont les managers absents.
Il te suffit de fixer des limites de disponibilité.
Ta porte ne doit pas être en permanence ouverte.
Il faut que ton équipe arrive à faire sans toi.
Tu dois montrer que tu n’es pas accessible en permanence. Mais tu dois aussi donner une bonne autonomie et les bonnes responsabilités aux bonnes personnes pour accomplir les bonnes tâches et atteindre les bons objectifs.
Cet effet boule de neige est indispensable pour un manager.
Pourquoi ?
Pour que les choses fonctionnent, qu’il soit présent physiquement au bureau. Ou lorsqu’il est en vacances ou en RTT.
Communiquer avec son équipe
Pour surmonter cette idée reçue du manager, il faut aussi expliquer à son équipe pourquoi il est important que tu te rendes dispensable.
Tu peux donner des disponibilités précises à chacun de tes collaborateurs.
Quand tu pars en vacances, il faut que tu mettes en place des stratégies pour ne pas être dérangée.
S’absenter se prépare, se planifie et s’explique.
Chaque démarche doit être expliquée pour que tes collaborateurs comprennent à quoi elle sert.
Ne le fais pas du jour au lendemain car ils risquent de ne pas comprendre.
Communiquer avec sa hiérarchie
Même s’il est important de le faire avec son équipe, il reste également important de le faire avec ses dirigeants.
Ton dirigeant ne doit pas se dire que tu es indispensable.
Être dispensable, ce n’est pas seulement fixer des limites, ni se détacher de ses responsabilités.
C’est au contraire renforcer ta responsabilité, de faire un pas de côté pour mettre en avant d’autres personnes.
Cette idée reçue du manager implique donc de sortir de l’opérationnel, de faire monter en compétence les bonnes personnes, d’apporter les bonnes responsabilités, de faire gagner son équipe en autonomie.
Tu le fais pour toi, pour ton équipe mais aussi pour ton entreprise.
C’est une démarche à 360°.
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